Jacques Rivière et les leçons de La NRF : modalités et pratique d'une relation critique / Alix Tubman-Mary ; sous la direction de Dominique Rabaté

Date :

Type : Livre / Book

Type : Thèse / Thesis

Langue / Language : français / French

Rivière -- Jacques -- 1886-1925 -- essayiste -- Critique et interprétation

Puech -- Jean-Benoît -- 1947-.... -- Critique et interprétation

Goux -- Jean-Paul -- 1948-.... -- Critique et interprétation

Bergson -- Henri -- 1859-1941

La Nouvelle revue française -- périodique

Littérature française -- 20e siècle

Littérature française -- 2000-....

Critique littéraire

Rabaté, Dominique (1960-....) (Directeur de thèse / thesis advisor)

Vaugeois, Dominique (1971-....) (Président du jury de soutenance / praeses)

Trémolières, François (1959-....) (Rapporteur de la thèse / thesis reporter)

Basch, Sophie (1963-....) (Rapporteur de la thèse / thesis reporter)

Université Paris Cité (2019-....) (Organisme de soutenance / degree-grantor)

École doctorale Histoire, langue, littérature et images : civilisations et sciences humaines et sociales (domaines francophones, anglophones et d'Asie orientale) (Paris ; 1992-....) (Ecole doctorale associée à la thèse / doctoral school)

Centre d'étude et de recherche interdisciplinaire de l'UFR LAC (Paris ; 2009-....) (Laboratoire associé à la thèse / thesis associated laboratory)

Résumé / Abstract : Les quatre dossiers qui composent cette thèse par VAE sont étroitement reliés les uns aux autres. Ils interrogent une forme de critique qu'on a longtemps dite « empathique », non sans parenté avec la « critique de la conscience » ou « la relation critique » présentées par l'école de Genève. Mais la compréhension de cet objet d'étude tend à se dérober lorsqu'on l'aborde sous le seul projecteur d'un discours théorique et métacritique qui lui est par nature antipathique. Je mènerai donc mon enquête en premier lieu sous l'angle du récit introspectif, pour expliquer comment et à travers quelles conditions j'ai pratiqué ce type de lecture. Croisant les approches de l'histoire littéraire, de l'histoire des idées, de la sociologie de la littérature et de l'analyse littéraire, j'ai ensuite procédé à un examen des raisons qui fondaient l'exceptionnel discernement de Jacques Rivière et le décollage, sous son secrétariat et sa direction, de La Nouvelle Revue Française. Le lointain inspirateur de l'école de Genève, à travers Albert Béguin et surtout Marcel Raymond, l'homme qui avouait « avoir introduit dans la critique les moeurs de l'amour » est bien loin de défendre une vision purement esthétique de la littérature. Comme bien des collaborateurs de La NRF, venu de la philosophie, il se tourne vers une critique heuristique qui s'interdit la technicité savante et s'efforce de mettre au jour, dans l'interaction critique, les fruits de l'observation de soi-même, des émotions et de la pensée, se tenant à l'affût des évolutions de son temps et refusant absolument le cloisonnement entre littérature et sciences humaines. C'est en m'insérant enfin dans le travail de réception qui se bâtit autour de deux écrivains de l'extrême-contemporain que je m'exerce à comprendre, par une démarche « performative », en quelque sorte, la nature d'une relation critique vivante, fondée sur une expérience sensible et émotive, dont j'ai étudié d'abord les modalités et le fonctionnement chez Rivière et à La NRF. Je propose ainsi deux essais sur les romanciers Jean-Benoît Puech et Jean-Paul Goux. Le premier de ces écrivains est à bien des égards un héritier de la tradition NRF. Fasciné par l'absolu littéraire, diariste, épistolier, essayiste, il a mis en place un univers ludique réversible où la permutation des rôles et le commerce avec le lecteur sont constamment présents. Avec Puech, la théorie devient fiction et se fait aventure romanesque. Jean-Paul Goux, de son côté, a édifié une oeuvre romanesque puissante, originale, emmenée par un phrasé qui porte, plutôt que l'intrigue, la dynamique du texte : il défend le roman comme fabrique du continu, comme « site archéologique » où résister à l'émiettement de l'espace-temps. Dans un cas comme dans l'autre, on a affaire à des oeuvres qui requièrent de leurs lecteurs, comme de leurs créateurs, la patience « d'habiter le temps ».

Résumé / Abstract : The four essays that form this PhD thesis are closely related to each other. They focus on a type of literary criticism often called empathique, which relates to the influential area of the Geneva School, including the works of Marcel Raymond, Albert Beguin or Jean Starobinski. Understanding such an object of study may not be adequately done if only from a theoretical point of view, its starting point being precisely the rejection of a purely theoretical and intellectual approach. I shall therefore pursue my inquiry, in the first part, in form of an autobiographical approach, explaining how and under what conditions I have practiced this type of reading. I then proceed to a close examination of the reasons why Jacques Rivière, the former secretary and director of the Nouvelle Revue Française (1911-1914 and 1919-1925), practicing such a type of criticism, played an essential role in the 'success-story' of the review NRF, and of the Gallimard publishing house. Rivière also appears as an important reference in the first steps of what was to become the Geneva School, through the influence he had on Marcel Raymond and Albert Beguin. His approach to literature was all but purely esthetic. Like many of his collaborators in the NRF team, he was first a philosopher, and practiced a heuristic critique, far away from scholarly and academic writing, and never using technical terms. He strives to uncover the fruits of self-observation, emotions and thought, while staying informed of the developments of his time (such as psychoanalysis) and establishing links between literature and humanities. I then concentrate on two writers of the XXth and XXIrst,century, putting myself among the critics who read and comment their work. In my essays about them, I look towards understanding the nature of a living critical relationship through a "performative" approach, based on a sensitive and emotional experience, in the style of what I first studied in Rivière. I therefore propose two essays on the writers Jean-Benoît Puech et Jean-Paul Goux. The first of them is in many ways an heir to the NRF tradition. Fascinated by literature as an absolute, being a diarist, a letter writer, and an essayist as well as a novelist, he sets up a reversible and playful universe in permanent interaction with his reader. Jean-Paul Goux, for his part, has built as a novelist a powerful and original universe. His prose is remarkable, tending to carry the reader along, even more so than the fascination for a plot or for characters. He defends the novel as an « archeological site » where it is possible to resist the crumbling of space and time. In either case, we are dealing with written works that require the patience of their readers, as well as of their creators, and an aptitude to inhabit a long-time approach.