Les Danses macabres hispaniques : Représentations de la mort de la péninsule Ibérique médiévale à la Nouvelle-Espagne / Benjamin Lambert ; sous la direction de Maria Ghazali et de Emmanuelle Klinka

Date :

Type : Livre / Book

Type : Thèse / Thesis

Langue / Language : français / French

Danse macabre -- Ibérique, Péninsule -- Moyen âge

Mort -- Ibérique, Péninsule -- Moyen âge

Danse macabre -- Nouvelle-Espagne

Mort -- Nouvelle-Espagne

Classification Dewey : 946

Classification Dewey : 306

Ghazali, Maria (1950-....) (Directeur de thèse / thesis advisor)

Klinka, Emmanuelle (19..-....) (Directeur de thèse / thesis advisor)

Marti, Marc (1965-....) (Président du jury de soutenance / praeses)

Marigno, Emmanuel (Rapporteur de la thèse / thesis reporter)

Merlo, Philippe (1967-.... ; hispaniste) (Rapporteur de la thèse / thesis reporter)

Baz Sánchez, Sara Gabriela (19..-) (Membre du jury / opponent)

Université Côte d’Azur (2020-....) (Organisme de soutenance / degree-grantor)

École doctorale Sociétés, humanités, arts et lettres (Nice ; 2016-....) (Ecole doctorale associée à la thèse / doctoral school)

Centre de la Méditerranée moderne et contemporaine (Nice) (Laboratoire associé à la thèse / thesis associated laboratory)

Laboratoire interdisciplinaire Récits Cultures et Sociétés. UPR 3159 (Nice ; 2012-....) (Laboratoire associé à la thèse / thesis associated laboratory)

Résumé / Abstract : Notre thèse de doctorat traite des représentations de la mort dans la péninsule Ibérique du bas Moyen Âge et du début de l'ère moderne, et du prolongement de celles-ci en Nouvelle-Espagne. Par représentations, nous entendons toute figuration artistique, spirituelle, sociale et mentale de la mort. Il apparaît qu'au cours du Moyen Âge, les royaumes hispaniques avaient développé une attitude singulière d'acceptation du trépas, en comparaison avec leurs voisins européens. La lecture commentée en chaire de l'Apocalypse continuellement depuis le VIIe siècle, associée au traumatisme de la perte d'un territoire à récupérer aux mains des Musulmans ainsi qu'aux difficultés démographiques, ont progressivement abouti à un sentiment mortuaire plus développé qu'ailleurs dans l'Occident médiéval. Durant le bas Moyen Âge, la mort devient un sujet de préoccupation parmi les sociétés hispaniques, et un sentiment nouveau d'acceptation de la dernière heure se développe au cours d'un XIVe siècle marqué par les conflits politiques et la catastrophe épidémique de la peste noire. Ainsi naquit le courant des Danses macabres, thème artistique issu de la religiosité médiévale chrétienne. Si le genre a connu ses plus célèbres représentations en France et en Allemagne, il apparaît que les royaumes hispaniques ont fortement contribué à son expansion, dans une forme singulière et antérieure aux productions que l'inconscient collectif considère comme les plus importantes. Progressivement, la mort, se faisant quotidienne et indissociable de l'imaginaire, va obtenir un rôle de médiateur symbolique entre la classe religieuse et la population, notamment à travers la forte consolidation des Ordres monastiques qui allaient devenir de plus en plus puissants à la fin du Moyen Âge. Parmi les Ordres mendiants, les Franciscains - communauté la plus répandue et la plus puissante en Espagne - sont ceux qui ont le plus adopté, exploité puis diffusé l'image de la mort. La grande majorité des œuvres d'art macabres connues en Espagne étaient intrinsèquement liées au contexte monastique franciscain, et servaient de mises en garde spirituelles : accentuer la mort, à travers des représentations artistiques explicites mettant en scènes des cadavres décharnés, était un moyen d'insister sur l'idée que la chair était corruptible, et que seule l'âme du chrétien pouvait être sauvée, méprisant ainsi les vanités terrestres. Dès la genèse de la Conquête, l'évangélisation massive de la population autochtone par les pouvoirs religieux chrétiens allait prolonger cette attitude mortuaire caractéristique de la péninsule Ibérique, et ce vers un nouveau territoire. Cette entreprise d'évangélisation, bien aidée par les communautés monastiques outre-mer - notamment franciscaines -, permit de donner naissance à une nouvelle société qui n'avait d'autre choix que d'être constamment en lien avec la mort, ayant intégré l'au-delà de la spiritualité mésoaméricaine à la cosmogonie chrétienne.C'est dans ce nouveau territoire, enfant de deux cosmovisions différentes, que se développera une expression artistique macabre considérable, bien enrichie par la sensibilité baroque des Temps modernes. Peu de temps avant les indépendances des nations d'Amérique, nous trouvons en Nouvelle-Espagne une véritable culture de mort dont le symbole le plus parlant nous semble être La portentosa Vida de la Muerte (1792) du frère franciscain Joaquín Bolaños, dernière grande œuvre d'art macabre héritée de la tradition médiévale chrétienne. L'héritage de ces deux mondes sera d'une importance telle qu'il deviendra petit à petit un symbole de la culture mexicaine, à travers une tradition populaire mettant en scène davantage les morts que les vivants, phénomène que nous pouvons encore constater aujourd'hui dans le Mexique quotidien.

Résumé / Abstract : This PhD thesis implies the confrontation between the vision of death related to totally opposite worlds : medieval and modern Spain on one hand, and Mesoamerica on the other. After the Conquest of the Aztec Empire and the territories from Ancient Mexico in the 16th century, a strong sentiment of religious and civilizational syncretism was born in the land that would later be called New Spain. This brand new Christian entity, that had been absorbing precolombian components beyond the tamed population, will follow its evolution until the formation of the modern Mexican nation, as if it was the child of both opposite poles, successor of two peoples whose cosmovisions were totally different. Therefore, this study focuses on the representations of death from the late Medieval period/beginnings of the modern era in the Iberian Peninsula, to its own exportation to New Spain. By representations, we would mean every artistic, spiritual, social or even mental symbol of death. It appears that throughout the Middle Ages, a singular attitude of acceptation of death grew among the Hispanic kingdoms, in comparaison to their European neighbours. The public lectures and commentaries about the Apocalypse, continuously since the 7th Century, coupled to the trauma of the territory loss to the Muslims and demographic issues, ended up a mortuary sentiment more elaborated than in any other land in Europe. During the Late Medieval Period, death became a matter of concern among the Hispanic societies, and a new feeling of last hour acceptation developps over the course of the 14th Century, heavily marked by political conflicts and the tragedy of the Black Plague. That is how Dances of Death were born from the christian medieval religiosity. Even though the genre was very popular in France and Germany, it seems that the Hispanic kingdoms heavily contributed to its expansion, in a singular way that was anterior to the other European productions that many still consider as the most famous or important one nowadays.Gradually, death was about to acquire a symbolical role of mediation between religous class and the population, thanks to the consolidation of monastic communities that would be more and more powerful at the end of the Medieval period. The Franciscan community, the most powerful and spread at this time in Spain, is the one who most exploited and shared the image of death. A majority of Spain macabre productions were associated to the Franciscan spirit, as they were used as spiritual warnings. The putrefacted corpse was then a way to emphasise the concept of the corruptible body, and only the soul of the Christian could be saved, in comparison to the vanities of Earth. Since the beginning of the Conquest, the massive evangelisation of the native population by the Christian religious institutions would extend this Iberian attitude, towards a new land. This evangelisation conquest, helped by monastic communities overseas -mostly Franciscan- allowed the birth of a new society constantly connected to the idea of death, between the Mesoamerican spirituality and Christian cosmovision. This new land, child of two different worlds, would extend a macabre artistic expression throughout the years, helped by the baroque esthetic from the Early modern period. A few years before the independance of American nations, a genuine culture of death was growing in the Viceroyalty of New Spain, whose most compelling symbol seems to be La portentosa Vida de la Muerte (1792) by the Franciscan monk Joaquín Bolaños, influenced by the Christian Medieval tradition. The legacy of these two worlds soon would be a symbol of Mexican culture, as its popular tradition depict more the dead than the living, a phenomenon that is still visible nowadays in Mexican daily life.