La perception précoce de la parole chez les enfants prématurés et nés à terme / Elena Berdasco Muñoz ; sous la direction de Thierry Nazzi

Date :

Type : Livre / Book

Type : Thèse / Thesis

Langue / Language : anglais / English

Prématurés -- Langage

Perception de la parole

Classification Dewey : 618.920 11

Nazzi, Thierry (Directeur de thèse / thesis advisor)

Peperkamp, Sharon Andrea (1967-....) (Président du jury de soutenance / praeses)

Bosch Galceran, Laura (Rapporteur de la thèse / thesis reporter)

Sansavini, Alessandra (Membre du jury / opponent)

Guellaï, Bahia (1984-....) (Membre du jury / opponent)

Université Sorbonne Paris Cité (2015-2019) (Organisme de soutenance / degree-grantor)

École doctorale Cognition, comportements, conduites humaines (Boulogne-Billancourt, Hauts-de-Seine ; 1996-....) (Ecole doctorale associée à la thèse / doctoral school)

Université Paris Descartes (1970-2019) (Autre partenaire associé à la thèse / thesis associated third party)

Résumé / Abstract : La prématurité est un problème de santé publique mondial qui affecte aujourd'hui 1 sur 10 enfants chaque année. En France, ce phénomène a régulièrement augmenté, les prématurés représentant 7,3% des nouveaux nés français en 2014, contre 5,9% en 1995. Des recherches scientifiques ont établi que les enfants nés prématurément sont plus susceptibles de rencontrer des difficultés dans le développement langagier ainsi que dans d'autres domaines cognitifs que les enfants nés à terme. Cependant, nos connaissances sur les habilités langagières précoces des enfants prématurés restent actuellement limitées. Le premier objectif de cette thèse était donc de spécifier différentes capacités de perception de la parole pendant les deux premières années, en référence à celles d'enfants nés à terme de même âge postnatal. Son second objectif était d'étudier si le degré de prématurité module les performances langagières des enfants prématurés. Cette thèse est organisée en trois parties expérimentales. La première a exploré la segmentation, c'est-à-dire la capacité à découper la parole en mots, qui est liée à l'acquisition du vocabulaire. Nos résultats ont établi qu'à 6 mois d'âge postnatal, les enfants prématurés ont des capacités de segmentation basiques (segmentation de mots monosyllabiques, Exp. 1), comme les enfants nés à terme de même âge postnatal (6 mois ; Nishibayashi, Goyet, & Nazzi, 2015) et corrigé (4 mois ; Exp. 2). Toutefois, nous avons aussi trouvé des différences avec les nés à terme. Si les enfants prématurés de 6 mois segmentent des syllabes intégrées dans des mots, comme précédemment trouvé pour les enfants nés à terme, l'effet de segmentation à des directions opposées chez les deux populations, suggérant différents mécanismes de traitement (Exp. 3). En outre, à 8 mois d'âge postnatal, nos résultats ne font pas apparaître de biais consonantique dans la reconnaissance des mots segmentés, comme chez les enfants nés à terme (Exp. 4). Néanmoins, des enfants bilingues prématurés et nés à terme qui ont le français comme langue dominante sont capables de segmenter des mots monosyllabiques à l'âge de 6 mois (Exp. 5). La deuxième partie a mesuré le comportement visuel d'enfants prématurés et nés à terme face à un visage parlant dans la langue maternelle (le français) et une langue étrangère (l'anglais). Nos résultats révèlent qu'à 8 mois, les enfants prématurés ont un comportement visuel différent de celui d'enfants nés à terme au même âge postnatal et corrigé. Alors que les enfants nés à terme ont un comportement visuel différent dans les deux langues, ce n'est pas le cas chez les enfants prématurés (Exp. 6). Ces comportements visuels différentiels sont les premiers éléments de caractérisation de la trajectoire développementale de la perception audiovisuelle des enfants prématurés. La troisième partie a porté sur le développement lexical. Nos résultats montrent que les enfants prématurés reconnaissent la forme des mots familiers à 11 mois d'âge postnatal (Exp.7), comme les enfants nés à terme (Hallé & de Boysson-Bardies, 1994). Concernant la production lexicale autour de l'âge de 24 mois postnatal (Exp. 8), nos résultats révèlent que les enfants prématurés ont un vocabulaire réduit par rapport aux enfants nés à terme de même âge postnatal, mais des niveaux similaires à ceux de même âge corrigé. Cependant, un pourcentage élevé des enfants prématurés étaient en dessous du centile 10 selon les normes de la population typique, ce qui pourrait constituer un indice d'identification de risque de délais langagiers. Pris ensemble, nos résultats offrent une vision plus détaillée et nuancée de l'acquisition langagière précoce des enfants nés à terme, et aident à mieux comprendre la contribution relative de l'input environnemental (i.e. exposition à input visuel et auditif non filtré) et la maturation neuronale à cette trajectoire développementale.

Résumé / Abstract : Prematurity is currently an important public health problem in the world that affects 1 in 10 babies worldwide every year. In France, preterm birth has steadily increased from 5.9% in 1995 to 7.3% in 2014. Research has demonstrated that prematurely born children are more susceptible to encounter some difficulties in language development and other cognitive domains than children born fullterm. To date, knowledge on early language abilities in preterm infants remains limited. The first goal of this doctoral research was to specify different speech perception abilities in the first two years of life in preterm infants, comparing their abilities to those of fullterm infants of the same postnatal age. The second goal was to investigate whether degree of prematurity modulates linguistic performance across preterm infants. This thesis is organized in three experimental parts. First, we explored word segmentation (the ability to extract word forms) from fluent speech, an ability that is related to lexical acquisition. Our findings showed that basic segmentation abilities are in place in monolingual preterm infants at 6 months of postnatal age (Exp. 1), since they segment monosyllabic words just like their postnatal (Nishibayashi, Goyet, & Nazzi, 2015) and corrected age (4-month-olds; Exp.2) fullterm peers. However, we also found differences with fullterms. While 6-month-old preterms segment embedded syllables as fullterms do (Nishibayashi et al., 2015), the direction of the effect is reversed, suggesting differential processing mechanisms (Exp. 3). Moreover, at 8 months postnatal age, we failed to find evidence for a consonant bias in recognition of segmented word forms (Exp. 4) as found for fullterms of the same age (Nishibayashi & Nazzi, 2016). Nevertheless, French-dominant bilingual populations were found to segment monosyllabic words in French at 6 months, whether being born pre- or full-term (Exp. 5). In the second part, using eye-tracking techniques, we measured preterm and fullterm infants scanning patterns of a talking face in the native (French) and a non-native (English) language. We found that preterm infants at 8 months postnatal age show different looking behavior than their fullterm counterparts matched on postnatal and maturational age. Compared to fullterm infants who showed different scanning pattern of a face speaking in the two languages, preterm infants showed similar scanning patterns for both languages (Exp. 6). These differential gaze patterns provide a first step to characterize the developmental course of audiovisual speech perception in preterm infants. The third part focused on lexical development. Our results show that preterm infants recognize familiar word forms at 11 months postnatal age (Exp. 7), hence at the same postnatal age as fullterm infants (Hallé & de Boysson-Bardies, 1994). With respect to word production at around 24 months of postnatal age (Exp. 8), we found that preterm infants have smaller vocabularies than fullterms of the same postnatal age, but as a group have similar levels as their fullterm, corrected age peers. However, more preterm infants were below the 10th percentile than expected based on (fullterm) norms, which might constitute an index for early identification of (preterm) infants at risk for linguistic delays. Taken together, our results help us build a more detailed and nuanced picture of early language acquisition in preterm infants, and better understand the relative contribution of environmental input (i.e. exposure to unfiltered auditory and visual input after preterm birth) and brain maturation on this developmental trajectory.