Conseillers et conseillères agricoles en France (1945 -1983) : l'amour du progrès aux temps de la "révolution silencieuse" / Sylvain Brunier ; sous la direction de Anne-Marie Granet-Abisset

Date :

Type : Livre / Book

Type : Thèse / Thesis

Langue / Language : français / French

Conseillers agricoles -- France -- 1945-1990

Professions -- France -- 1945-1990

Innovations agricoles -- France -- 1945-1990

Agriculture -- Vulgarisation -- France -- 1945-1990

Granet-Abisset, Anne-Marie (1955-....) (Directeur de thèse / thesis advisor)

Mayaud, Jean-Luc (Président du jury de soutenance / praeses)

Lemercier, Claire (1976-.... ; historienne) (Rapporteur de la thèse / thesis reporter)

Rieutort, Laurent (1965-....) (Rapporteur de la thèse / thesis reporter)

Rémy, Jacques (1944-....) (Membre du jury / opponent)

Dalmasso, Anne (19..-.... ; historienne) (Membre du jury / opponent)

Université de Grenoble (2009-2014) (Organisme de soutenance / degree-grantor)

École doctorale sciences de l'homme, du politique et du territoire (Grenoble ; 2001-....) (Ecole doctorale associée à la thèse / doctoral school)

Laboratoire de recherche historique Rhône-Alpes (Lyon ; 2003-....) (Equipe de recherche associée à la thèse / thesis associated research team)

Résumé / Abstract : L'histoire des conseillers et conseillères agricoles offre la possibilité de relire à frais nouveaux le processus de modernisation de l'agriculture française de la Libération au début des années 1980. Etudier l'histoire de ce devenir professionnel singulier induit un double questionnement sur les moyens déployés dans le cadre du projet modernisateur après-guerre, ainsi que sur la professionnalisation du groupe des conseillers et conseillères, en refusant de faire de ces derniers de simples courroies de transmission des politiques publiques. Dans les années 1945-1959, de nouvelles formes d'encadrement des pratiques agricoles sont mises à l'essai, dans la perspective de planifier l'accroissement de la productivité du travail agricole. Pour inciter les agriculteurs à transformer leurs pratiques, les promoteurs de la vulgarisation du progrès technique imaginent des dispositifs inédits reposant sur la présence permanente d'un technicien aux côtés des agriculteurs. Ces premiers conseillers agricoles se placent progressivement sous la tutelle des organisations professionnelles agricoles, et des Chambres d'agriculture en particulier, pour affirmer leur autonomie vis-à-vis des services de l'État d'un côté, et des entreprises commerciales de l'autre. La notion d'économie morale de la modernisation du monde agricole permet de rendre compte de la convergence politique entre ces conseillers et les représentants de la petite et moyenne paysannerie en voie de modernisation. La première reconnaissance officielle accordée aux conseillers agricoles par les décrets de 1959 ouvre une seconde période, qui s'étend jusqu'au début des années 1970, marquée par la constitution d'un groupe professionnel spécifique des conseillers et conseillères agricoles. Ce processus de professionnalisation demeure pourtant inachevé, le passage de la vulgarisation au développement institué par le décret du 4 octobre 1966 initiant un contrôle plus resserré du conseil en agriculture. Appuyés sur les centres de formation, les services techniques des Chambres d'agriculture, les groupements techniques agricoles locaux, ainsi que sur leurs syndicats, les conseillers et conseillères parviennent néanmoins à forger un imaginaire professionnel attractif, qui devient un point de référence incontournable pour l'ensemble des intervenants d'un secteur para-agricole alors en pleine croissance. Le métier de conseiller se définit par un jeu constant sur la proximité et la distance aux agriculteurs, supposant une intelligence pratique des pratiques agricoles et une habileté particulière pour les détourner de leur cours habituel, dans la double perspective d'un accroissement continu de la productivité du travail agricole et de la promotion sociale des exploitants familiaux. En 1972, la crise de l'appareil de développement inaugure une troisième phase de l'histoire des conseillers agricoles. A l'aune des instruments introduits par le programme de Rationalisation des choix budgétaires, leur intervention est désormais critiquée pour son manque d'efficacité. Concurrencés par des agents de développement agricole toujours plus nombreux, conseillers et conseillères tendent à s'effacer comme groupe professionnel spécifique sur le plan national, tout en élaborant de nouvelles stratégies sur les plans local et départemental pour réinventer leur relation aux agriculteurs. L'organisation des États généraux du développement agricole en 1982-1983 entérine la coexistence de plusieurs logiques de développement là où le projet modernisateur était d'abord institué comme élan unitaire du monde agricole vers le progrès. Si le groupe professionnel des conseillers et conseillères se décompose progressivement selon les logiques propres aux différents métiers du conseil, empêchant une réelle transmission de leur identité collective, l'institution imaginaire du métier de conseiller continue d'irriguer les initiatives en matière de développement agricole et rural.

Résumé / Abstract : The history of agricultural advisers allow to reconsider the process of modernization of French agriculture from the Liberation until the early 1980s. Studying the history of this singular professional becoming leads to a dual inquiry on the means deployed to implement the postwar modernizing project, and the professionnalization of the group of the advisers, refusing to consider them as a transmission belt of public policies. During the years 1945-1959, in order to planning the increase of agricultural productivity labour, new forms of technical framework are tried. To encourage farmers to transform their own practices, promoters of agricultural extension test unprecendented devices based on the permanent presence of a technician on the side of the farmers. These first advisers place themselves progressively under the authority of professionnal agricultural organisations, Chambers of Agriculture in particular, to assert their autonomy from the administration control on the one hand, and the firms of the other. The concept of moral economy of the farming world modernization allows to understand the political convergence beetween these advisers and the small and medium modernizing peasantry representatives. First official recognition given to agricultural advisers by decrees of 1959 open a new period, wich extends until the early 1970s, marked by the formation of a specific occupational group of advisers. This professionalization process nevertheless remains unfinished, the passage of the extension development established by the decree of October 4, 1966 initiating a tighter control on agricultural extension. Relied on training centers, technical services of Chambers of Agriculture, local agricultural technical groups, and their own unions, advisers still manage to forge an attractive professional imaginary that becomes a point of reference for all the technicians in a para-agricultural sector while growing. The business adviser is defined by a constant game of proximity and distance to farmers, assuming practical intelligence of agricultural practices, with the dual aim of continuously increasing productivity agricultural labor and social advancement of family farmers. In 1972, the crisis of the national developing device opens a third phase in the history of agricultural advisers. Judging by the instruments introduced by the rationalization program budget decisions (Rationalisation des choix budgetaires), their involvement is now criticized for its lack of effectiveness. Competition from agricultural development workers increasingly numerous, advisers tend to disappear as specific professional group on a national level, while developing new strategies at the local and county to reinvent their relationship with farmers. The organization of the States General of the agricultural development in 1982-1983 confirms the coexistence of several logics of development where the modernizing project was first established as the agricultural unit impulse towards progress. If the occupational group of advisers gradually breaks down, preventing a real transmission of collective identity, the imaginary institution of their trade continues to irrigate agricultural and rural development initiatives before the end of the studying period.