Rééduquer les mauvaises filles : définition et traitement de la déviance juvénile féminine dans la France des Trente Glorieuses / Anne Thomazeau ; [sous la direction de] Anne-Marie Sohn et Jean-Noël Luc

Date :

Editeur / Publisher : [S. l.] : [s. n.] , 2010

Type : Livre / Book

Type : Thèse / Thesis

Langue / Language : français / French

Éducation surveillée -- France -- 1945-1970

Maisons de correction pour femmes -- France -- 1945-1970

Contrôle social -- France -- 1945-1970

Éducation des filles -- France -- 1945-1970

Sohn, Anne-Marie (1946-....) (Directeur de thèse / thesis advisor)

Luc, Jean-Noël (1950-....) (Directeur de thèse / thesis advisor)

École normale supérieure de Lyon (2010-...) (Organisme de soutenance / degree-grantor)

Résumé / Abstract : L’objet de cette étude est d’analyser la déviance juvénile féminine et son traitement dans la France des Trente Glorieuses, en croisant les histoires du genre, de la déviance et du contrôle social. Durant les années 1940, un nouveau modèle de prise en charge donnant le primat à l’éducation sur la répression est mis en œuvre : l’internat de rééducation. Etudier les archives de ces établissements, en particulier les dossiers individuels de placement, permet de mettre en évidence une définition de l’irrégularité juvénile différenciée non seulement selon la catégorie sociale, ce qui entraîne une surreprésentation des jeunes de milieux populaires, mais aussi selon le sexe. La déviance féminine est moins pensée en termes d’illégalisme que de non-conformité aux normes sociales, en particulier de genre. Aussi, au cours des années 1940-1960, dans les internats féminins publics ou privés, majoritairement gérés par des congrégations religieuses, la rééducation est-elle essentiellement conçue comme une entreprise de moralisation et de normalisation sous-tendue par des représentations traditionnelles des rôles sexués et de l’organisation sociale et impliquant des méthodes mêlant héritages et innovations : clôture, discipline et coercition, mais aussi pédagogie de groupe, formation familiale et enseignement professionnel. A partir du milieu des années 1960, cette conception est progressivement remise en cause tandis que les internats s’ouvrent davantage et que leurs règlements s’assouplissent. Les internats de rééducation apparaissent ainsi comme des instances de diffusion et d’imposition de valeurs éducatives et de normes de genre elles-mêmes en mutation dans la société française.

Résumé / Abstract : This study intends to analyse female juvenile deviance and its treatment during the post war French economic boom period, using gender, deviance and social control histories. The 1940's saw the development of a new system of rehabilitation aiming at educate rather than repress : the “internat de rééducation”, that is reform boarding schools. By analysing archive documents from these institutions, in particular individual placements records, we can show how juvenile irregularity was defined not only on a social categorisation basis, which led to young persons from lower classes being over-represented, but also on a gender basis. At the time, female juvenile deviance was defined more as a departure from social norms, especially gender norms, rather than unlawful behaviour. During the 1940-1960 period, in private or public female reform boarding schools, mostly managed by religious orders, to be rehabilitated meant to accept morals and norms fitting untold traditional representations of gendered roles and social organisation. This rehabilitation work implied traditional methods as well as innovative ones : confinement, discipline and coercion, but also group pedagogy, family formation, and professional teaching. Since the middle of the 1960's, this notion of what rehabilitation should be was more and more put into question, while the rules of these reform boarding schools became more liberal. It appears thus that these reform boarding schools legitimized and spread educational values and gender norms that were then evolving in the French society.